fin
Plus quune minute avant ma fin.
Je me donne encore un dernier moment pour respirer quelques dernières bouffées de cet air qui ne ma jamais autant étouffé.
Jai enfin le courage de partir pour mieux retrouver mon fils et quitter cette femme qui ma délaissé.
Depuis le drame, nous nétions plus que des fantômes, transparents, vides de tous sentiments.
Cest drôle comme les dernières pensées vont à ce qui rattachent à la vie.
Je me dis et cest complètement idiot que je ne verrai jamais la fin de ma série culte, tant pis jirai ailleurs sans connaître la vérité
Je pense quenfin je vais pouvoir arrêter de fumer. En dix secondes, record battu.
Jai des flashs de mes plats favoris, aux livres que je ne dévorerai plus, et que je ne ferai plus jamais lamour.
Cest lheure, la minute est passée, dépassée et je suis décidé.
Plus quun clic avant le néant.
Je prends ma dernière inspiration doxygène, après je nen aurai plus besoin.
Mon doigt se raidit, le chien se recule, la balle bondit.
Je me sens projeté en arrière et jai limpression de recevoir un coup de poing sans ressentir de douleur, pas encore.
Je tombe, ma tête frappe le sol froid du carrelage du salon.
Puis, plus rien.
Je me sens comme engourdi, la douleur ne vient pas.
Je ne contrôle plus mon corps et pourtant jentends des cris au loin, ma femme sûrement.
Les hurlements me semblent à dix mille lieux de moi, malgré tout je perçois les vibrations de pas tout autour de mon corps.
Jai le sentiment que lon me piétine.
Il paraît que les serpents sont sourds et quils ne reconnaissent notre venue quà la vibration de nos pas sur le sol.
Damned, je suis réincarné en orvet !
Les coups sestompent, je ne sens et nentends plus rien.
Je suis dans le noir, et après ? Quest-ce qui viens après ?
Cest ça la mort ? Etre dans le noir toute son existence ?
Et alors ? Foutaise le tunnel blanc ? Conneries St Pierre et toutes les blagues idiotes quon pouvait se raconter au collège à son sujet ?
Merveille de limagination Dieu et ses préceptes ?
Mais moi je nai pas tiré pour çà, je me suis tuer pour oublier.
Je ne lai pas fait pour continuer à penser !
Je voulais fuir la mort de mon fils.
Ou alors cest ça lenfer.
Lenfer cest ressasser tous les mauvais moments de son existence, tous ce quon a loupé.
Je suis censé faire quoi ?
Repartir de ma plus tendre enfance ? Me rappeler les vols de billes et petits soldats de mes copains de classe ?
Bien sur que si cétait à refaire je changerai beaucoup de choses, dailleurs je changerai tout.
Je ne laisserai plus passer les occasions avec les filles que je nai pas su voir.
Je dirai mes émotions aux femmes que je nai pu avoir.
Et jessaierai de ne pas regarder celle que jai aimée et qui ma apporté tant de désespoir pour ne pas faire cet enfant qui vient de partir.
Jaimerai changer de travail bien sur, modeste petit employé de bureau ; je ne laisserai aucune trace derrière moi.
Je rêvais dessiner, javais un don avant dabandonner lidée et de trouver cela absurde en grandissant.
Jaurai du insister pour que mes ambitions dhier deviennent mon talent daujourdhui.
Une vie à refaire en somme, cest ridicule.
Je divague, tant quà faire pourquoi ne pas demander à renaître en fils démirs, ne rien avoir à glander à part dépenser un petit million journalier.
Tiens, même mort, je reste cynique.
Je dois être une âme damnée, personne ne vient me chercher.
Je dois passer léternité à revivre cette vie qui ma brisé.
Je ne ressens plus les piétinements pourtant elle doit sagiter autour de ma dépouille.
Il y a bien longtemps que je ne lavais fait réagir.
Par contre le néant séclaircit.
Il fait gris, ça y est japerçois un point de lumière, ou est-ce le trou quà fait la balle en pénétrant mon crâne.
Oui, je me regarde de lintérieur, la lumière doit être celle du néon de la cuisine.
Ce point se rapproche et je ne distingue rien, trop petit, trop loin.
Jai peur, je ne veux pas revenir et si cétait les secouristes en train de me ramener à la vie ?
Je veux oublier et partir ;
On dirai un mauvais film, je ne veux pas aller vers la lumière.
Et si au contraire cétait la délivrance.
Si le fameux tunnel blanc existait vraiment.
Je mapproche, juste pour voir.
Si ce que je vois ne me plait pas, je rebrousse chemin et je retourne dans le noir.
Le trou sagrandit doucement, que du blanc, luminescent, presque aveuglant, presque.
Je perçois comme des sons étouffés, noyés dans leau.
Je sens que ça vis, je sens que ça bouge.
Il faut que je prenne une décision maintenant que je suis au bord.
Je nest plus rien à perdre, je vais enfin savoir ce quil y après.
Je glisse, dehors
La lumière est trop forte, je ne vois rien, on me frappe et je hurle puis ;
Puis lon me pose doucement, délicatement sur une source de chaleur que je suis censé connaître.
On me parle et me berce.
Je ne crie plus, je ferme et ouvre les yeux.
Je les ferme et joublie.
Enfin joublie
début
vince
18.2.2003