Scénario original de Cédric Aguilar
OCTOBRE 2004 / N°SACD : 171604
La photo est en noir & blanc. Un enfant dune dizaine dannées, un garçon au teint sombre, affiche un large sourire. Son visage se caractérise par des traits fins et une peau lice. Bref, il a un joli petit minois.
Le Clown (off, un accent hispanique)
Le rire dun enfant
cest ce quil y a de plus pur !
Ecoutez attentivement un rire denfant ; vous verrez,
cest naïf, sans aucune retenue, bruyant lorsquil est spontané, certes, mais un rire nest t-il pas fait pour être extériorisé ? Un rire étouffé est un rire mort-né.
Le petit garçon pose de façon très fière, semble t-il pour un portrait de classe. Il semble assis et positionné de _.
Le Clown (off)
Mais avant tout, un rire denfant est communicatif.
Et sil est naturel, alors lhumanité peut rire de
la même chose
Cela fait longtemps que je nai pas entendu un
Le titre, « Un rire denfant », apparaît sans masquer le visage et lon entend quelques enfants en plein fou rire.
1. CIRQUE / LOGE DU CLOWN / TABLE DE MAQUILLAGE (clown assis) - INT NUIT
Le clown est assis devant sa table de maquillage ; face à lui, un miroir orné dampoules comme on peut en trouver dans la loge dun artiste.
Il se maquille avec beaucoup de délicatesse.
Le Clown (off)
Je mappelle Javier Alvaro Montoya. Je suis cubain
et jai 42 ans. De ma jeunesse, je ne regrette rien.
Jai grandi à Pinar del Rio, jai fais des choses
bien et moins bien, mais cétait là lécole de ma vie.
Cela dit, je rêvais dun jour où lon pourrait me
laisser fouler les planches du théâtre municipal,
lun des plus beaux de Cuba : El Milanes !
La pièce est plutôt sombre, la seule source lumineuse provient du miroir.
Il poursuit son maquillage.
Le Clown (off)
Mais les saltimbanques de mon espèce ne semblaient
pas les bienvenus à lépoque ; peut-être est-ce
différent maintenant ?
Je lignore. Je nai pas
remis les pieds à Cuba depuis mes 17 ans. Mais cet
édifice compte énormément pour moi. Tous les soirs,
après le travail, quand je rentrais de la fabrique
de cigares où je triais les feuilles de tabac,
je faisais un petit détour pour passer devant et
fouler de vingt et un pas exactement le trottoir
de la façade principale.
Une carte postale du théâtre est scotché dans un coin du miroir.
1.
Le Clown (off)
Sa carte postale ma toujours suivi, dans tous les
cirques où je faisais ce que je savais faire de mieux
le Clown.
Il prend un crayon de maquillage sur la table et dessine sur son visage.
Il a lair infiniment triste et désemparé.
Le Clown (off)
Cela fait 6 mois maintenant quaucun enfant nest
venu voir mes exploits et ceux de Malou sous mon
chapiteau.
Il soupire, regardant sa chienne couché, à ses pieds, dans un petit panier en osier. Malou le regarde également, avec admiration.
Puis, il se lève, regardant de plus près son maquillage dans le miroir.
2. CIRQUE / LOGE DU CLOWN / LE CANAPE (clown debout) INT NUIT
Il se dirige vers un canapé situé dans un coin sombre de la loge. Un costume de clown, paré çà et là de nombreuses couleurs vives et multiples motifs rigolos, y est posé délicatement. Non loin de là, au pied du canapé, une vielle paire de souliers de clowns.
Le Clown (off)
Après Cuba, je suis allé en France, où jai erré
de cirque en cirque, des plus minables aux plus
prestigieux. Jy ai gagné une certaine notoriété
dans le milieu, en tant que « clown sans paroles »
et dresseur de chiens.
Le clown enfile soigneusement son costume. Un gros tambour poussiéreux avec ses baguettes était rangé à proximité. Le clown y perd son regard sans grand intérêt. Mais il perçoit très faiblement des coups de tambour, sans doute son imagination se dit-il.
Le Clown (off)
Puis un jour, jai voulu voler de mes propres ailes
et jai repris un petit cirque en faillite. Le succès
fût au rendez-vous, du moins un certain temps.
Les enfants et leurs parents, comblaient mon chapiteau
de joie, dapplaudissements et de rires. Jusquau jour
où plus aucun enfant ne vint sabriter chez moi.
Le clown se saisit, sur un vieux mannequin à proximité, dune perruque rousse frisée, sur laquelle est fixé un petit chapeau melon.
Le Clown (off)
Je nai pas connu mon père! Mais ma mère disait que
cétait quelquun de dissipé et têtu. Je sais que
je me serais bien entendu avec lui. Enfin jai vécu
dix sept ans à Cuba, avec pour seul et véritable amour,
celui de ma mère.
Le clown, fin prêt, sort dune poche de sa veste, une photo quelque peu usée par les années. A la fois ému et attendrit, il la regarde un instant, puis la replace délicatement dans sa poche.
Le Clown (off)
Je ne sais pas pourquoi les enfants boudent mon cirque
depuis quelques temps. On formait pourtant un duo
exceptionnel, Malou et moi !
Il regarde Malou, toujours dans son panier, mais sur ses quatre pattes face à son maître, fière et excitée. Le clown lui interdit de le suivre, dun signe émouvant de la tête. Malou dresse ses oreilles en penchant légèrement sa tête sur le côté, puis sassoit sur son arrière-train.
Le clown se saisit dun petit coffret à proximité et le pose sur la table de maquillage. Il en sort un revolver un peu poussiéreux quil glisse instantanément sous sa veste pour le cacher à Malou.
Le Clown (off)
Malou est tout ce qui me reste; mon cirque est là,
mais sans enfant, il nest rien!
Malou émet un léger gémissement, sentant son maître et partenaire faire une bêtise. Celui-ci saccroupît et la caresse tendrement.
Le Clown (rapidement)
Chut! Chut! Chut! Chut !
Il sort de la loge, le pas traînant.
3. CIRQUE / LES COULISSES INT NUIT
Le clown marche dans la pénombre de ce qui semble être un large couloir, une lampe de poche à la main. De temps en temps, il détourne le faisceau lumineux sur les côtés pour y voir de vieux accessoires de cirque poussiéreux ; des cerceaux, de gros ballons en plastique, plusieurs objets de jonglage. Un peu plus loin, des costumes de toutes sortes sont accrochés à des cintres, ayant perdu leur éclat originel dans lobscurité. Il marque alors une pause devant laffiche dun vieux film accrochée au mur ; un coin de celle-ci se détachant, il la parcoure de haut en bas pour y lire successivement « CHARLES CHAPLIN » et « LES FEUX DE LA RAMPE ».
Le Clown (off)
Pour quun enfant ait foi en lhumour dun clown,
il faut que le clown ait foi en lenfant !
Peut-être que je ne fais plus rire. Un cirque,
on y va surtout pour rire, et si le clown
nest pas drôle, on sennuie. Il est peut-être temps
que je me retire. Si seulement on pouvait me redonner
une chance de faire rire, ne serait-ce quun enfant !
Après quelques secondes de recherche, il trouve enfin le tableau déclairage de la piste. Il pousse les boutons un à un mais rien ne se passe. Puis, il actionne le bouton dalimentation générale. Aussitôt, une masse lumineuse envahit le couloir.
Le Clown (off)
Maintenant, les enfants migrent vers les cinémas,
toujours plus grands, toujours plus racoleurs;
du spectaculaire à la carte, une usine à rêves
disent certains ! Le cirque, ce nest pas lusine,
cest de lartisanat familial.
Le clown est face à la lumière, immobile. Il soupire, fermant les yeux ; il se concentre.
Soudain, il distingue des applaudissements et des petites voix ; les enfants scandent très haut et en cur
Le Public
Alvaro! Alvaro! Alvaro!
Il sourit, une larme coule discrètement sur sa joux maquillée.
La voix dun speaker prend enfin le dessus sur les cris des enfants
Le Speaker
Et maintenant, pour la plus grande joie des petits
et des grands, voici le clown que vous attendez tous, lextraordinaire, le merveilleux, limprévisible
et le non moins rigolo, ALVAROOOOO!
Sen suit une vague sonore époustouflante. Le clown rouvre les yeux.
Le Clown (off)
Veuillez mexcuser, mais je crois quon me demande!
Il sélance brusquement vers la lumière et entre enfin en piste.
4. CIRQUE / LA PISTE INT NUIT
Il court jusquà lextrémité de la piste, puis grimpe sur le rebord, à quelques mètres des gradins. Il est en état second ; les gradins sont vides mais il fait comme si
Il fait un tour dhonneur pour saluer le moindre gradin vide !
Soudainement, lambiance festive du chapiteau sestompe alors que le clown distingue une silhouette dans les gradins baignant dans lobscurité. Il est essoufflé après ses multiples allées et venues mais reste immobile au centre du chapiteau, comme intimidé par cette présence inattendue.
5. CIRQUE / LA PISTE & LES GRADINS INT NUIT
La silhouette est celle dun enfant mais de son visage, lon ne distingue clairement que sa bouche. Lenfant ne sourit même pas ! Le clown commence son numéro timidement puis poursuit avec un peu plus denthousiasme, toujours face à lenfant. Il se démène comme il peut mais il nest pas spécialement drôle, dailleurs lenfant ne réagit pas.
Le Clown (off)
A ce stade, je ne saurais dire si cet enfant est là
pour me redonner espoir ou si la Mort en personne
prend forme sous des traits familiers pour rendre
plus doux à mes yeux, « le passage de lautre côté » !
Scrutant régulièrement la silhouette, il poursuit ridiculement sa prestation.
6. CIRQUE / LA PISTE & LES GRADINS INT NUIT
Après quelques minutes de représentation, lenfant se lève puis reste immobile un instant, face à la piste. Le clown interrompt son numéro et reste également immobile au centre de la piste, face à lenfant.
Puis, celui-ci descend des gradins et se dirige vers la sortie du chapiteau. Le clown regarde lenfant partir, la larme à lil. Il séloigne jusquà disparaître complètement dans lobscurité.
Désespéré, le clown tombe à genoux, tête baissé.
Le Clown (off)
Me voilà sur le point de partir. Il mest très clair
à présent que je ne suis plus sur une piste de cirque,
mais bien dans lantichambre de la Mort. Je me suis
souvent demandé sous quel forme elle mapparaîtrait
le moment venu. Dans mon cas, je trouve que lironie
est le pire des visages quelle puisse mimposer.
Puis, il plonge la main dans sa veste. Il en sort le revolver et le porte à la tempe, inconsolable.
7. CIRQUE / LA PISTE INT NUIT
Un aboiement aigu tranche soudainement le silence des lieux. Il semble venir du couloir dans le dos du clown. Un autre aboiement, plus proche, fît sursauter lartiste décadent. Il distingue alors, des petits bruits de pas se rapprochant de lui, mais il reste immobile. Quelques instants plus tard, Malou se trouve face à son partenaire, larrière train posé.
Ne voyant aucune réaction de la part du clown, Malou envoie une salve daboiement qui fait sourire son « interlocuteur ». Elle remue alors la queue, et aboie de plus belle, semblant même faire la morale à son ami. Mais une détonation vient troubler violemment lentrain de Malou qui sursaute de peur.
Le clown vient dappuyer sur la détente
Un grand silence prend soudainement possession des lieux. Tout semble figé sous le chapiteau. Cest alors que le revolver tombe sur le sable de la piste dégageant du sol, une vapeur de poussière sous limpact. Fixant le revolver, Malou remue soudainement la queue et regarde à nouveau son partenaire. Le clown est toujours à genoux. A lextrémité du canon, il y a un petit drapeau de tissu rouge sur lequel est inscris en lettres noires, « BANG ! ». Malou reprend ses aboiements de plus belle, alors que le clown se redresse lentement sur ses jambes. Ils restent, tous deux, un moment face à face, immobiles au centre de la piste.
Le Clown (off)
Mon ange gardien!
Il regarde Malou avec tendresse.
Le Clown (off)
Finalement, il est logique de penser quen de tels
moments lon puisse avoir un ange gardien à ses côtés.
Quelquun qui, par je ne sais quel miracle, a remplacer
une balle de revolver par un « BANG !». Mais alors,
qui était cet enfant ?
8. CIRQUE / LA PISTE INT NUIT
Soudain, le clown fait mine de partir soudainement vers sa gauche mais stoppe aussitôt ! Malou, surprise, effectue exactement le même mouvement brusque vers sa droite, avec un léger retard. Ils reproduisent presque de suite la même scène mais du côté opposé, comme pour tester les réflexes de chacun, retrouver leurs marques vis à vis de leur partenaire de piste. Ils se fixent droit dans les yeux comme deux enfants qui projètent sournoisement de faire une bêtise ; un air malicieux balaye leur regard
Le Clown (subitement à Malou, en espagnol)
VAMOS! / ON Y VA!
Malou se lance, alors, dans un sprint effréné, parcourant la circonférence de la piste, tout en aboyant de joie. Elle fait des cercles très large autour de son partenaire qui la suit du regard au centre de la piste. A chaque tour queffectue Malou, ses cercles de course rétrécissent. Le clown a de plus en plus de mal à la suivre du regard. Sa tête fait des vas et viens dans tous les sens mais Malou parvient chaque fois à se dérober du regard de son partenaire
Malou trace, à présent, des cercles très petit autour du clown, mais celui-ci reste toujours immobile, manifestement dépassé par la rapidité de son assaillant.
En moins de temps quil nen faut pour le dire, le clown seffondre littéralement à terre. Malou vient de faire trébucher malicieusement sa proie avant de se placer face à celle-ci, quelques mètres plus loin, aux arrêts !
Le clown reste immobile quelques secondes, face contre terre. Puis, il lève inconsciemment le regard vers les gradins derrière Malou. Les yeux emplis dune joie soudaine, il perçoit à nouveau la silhouette de lenfant, toujours dans lobscurité.
Brusquement, le clown se redresse sur ses membres inférieurs et se jette sur Malou
Les deux « vedettes » de la piste, en musique, se lancent alors dans un balai de jeu du chat et de la souris, de cabrioles et autres gags du meilleur humour ! Le spectacle proposé est dune vitalité et dune perfection digne des plus grands cirques. Ils font preuve, tous deux, dune imagination sans borne. Néanmoins, le clown jette un il en direction de la silhouette. Lenfant est toujours à sa place, toujours dans lobscurité.
Rassuré, il reprend aussitôt les « hostilités » avec Malou
Après toujours plus de chutes du clown et de sauts périlleux de Malou, le spectacle bat son plein ; cest une « poésie » mêlant sagacité et précision soutenue par une véritable valse dexploits personnels.
Le clown espionne régulièrement du coin de lil la silhouette dont il ne peut distinguer clairement que la partie basse du visage.
Le Clown (off)
Qui est cet enfant? La Mort, si cest elle, nest
décidément pas prête à me redonner espoir. Elle
mimpose son regard inquisiteur sans le moindre
répit, sans le moindre rire. Mais qui est donc
cet enfant ?
Soudain, le clown croit entendre un rire. Continuant le numéro, il regarde une nouvelle fois ; cest bel et bien lenfant qui rit ! Surpris, il cesse momentanément son spectacle. Les deux artistes se regardent puis tournent la tête vers lenfant, un peu déboussolés.
Un autre enfant (en espagnol, riant)
Màs, Alvaro ! Màs ! / Encore, Alvaro ! Encore !
Stupéfié par cette soudaine intervention verbale, il sent du coin de lil une autre présence dans lobscurité des gradins. Il pivote alors la tête vers la gauche. Une autre silhouette se trouve là ; une silhouette denfant ! Son regard revient vers la première silhouette, qui rit de bon cur à présent.
Un autre enfant (en espagnol)
Si, Alvaro ! Queremos màs ! / Oui, Alvaro ! On en veut plus !
A nouveau surpris par lintervention soudaine du nouvel enfant, il regarde à nouveau celui-ci. Puis, sortant peu à peu de sa stupeur, il sétonne dentendre le son de sa propre voix.
Le Clown (en espagnol)
Claro que si, nino ! Claro que si ! / Bien sûr que oui, gamin !
Cest alors que Malou et son acolyte redoublent deffort dans un numéro totalement improvisé qui frise la perfection en matière dacrobaties, de gags et surtout damusement.
Il y a à présent cinq ou six silhouettes dispersées un peu partout dans les gradins. A chacun de ses regards en direction des tribunes, le clown distingue de plus en plus de public et les rires denfants sont parfaitement audibles à présent.
Lambiance sous le chapiteau a soudain un nouveau visage ; celui, maquillé par les rires et applaudissements des jeunes spectateurs. Des familles entières maintenant présentes, le père, la mère et les enfants, côte à côte, réchauffent considérablement latmosphère du lieu. La première silhouette est toujours là, dans lobscurité, mais rit de bon cur. Cest la seule personne que le clown distingue la moins bien. Le visage reste toujours un mystère aux yeux du clown.
Il ny a plus une place de libre maintenant ; les deux « lumières » de la piste viennent de conclure, dans un tonnerre de cris et dapplaudissements. Ils sont tous deux au centre de la piste, côte à côte, lui debout et Malou à ses pieds, respirant à poumons ouverts. Tirant la langue, Malou secoue la queue violemment dans tous les sens.
Alvaro le Clown est ébloui par tant damour quon lui offre soudainement.
9. CIRQUE / LA PISTE INT NUIT
Les projecteurs multicolores du chapiteau vont bon train de part et dautres de la piste et des gradins.
Le Clown (off)
Voilà, cest de « ça » dont je voulais vous parler ce soir.
Je dis « ça », parce ce que je ne peux traduire cet
instant par les mots. Simplement, écoutez et ressentez !
Les enfants et leur parents scandent le nom du clown tout en applaudissant.
Alvaro regarde à présent la première silhouette qui sourit toujours autant.
Le Clown (off)
Mais qui est-ce ? La Mort ne rigolerait pas comme ça !
Pas de cette façon.
Soudain, lenfant, entre deux exclamations de joie, se penche en avant et dévoile enfin son visage à la lumière. Il a lapparence dun enfant de neuf ans, très brun, les sourcils renforcés et le teint mat. Son visage est dune fraîcheur angélique. Le clown, bouche bée, reste figé.
Le Clown (off)
Mon ange gardien ! Qui a le pouvoir de changer une balle
de revolver en farce ? Qui a le pouvoir de changer
désespoir en espoir ? Mon ange gardien ! Moi !
Son regard reste fixé sur lenfant, très souriant, qui après quelques secondes replonge son visage dans lobscurité.
Alvaro pose délicatement sa main à plat sur une des poches de sa veste. Puis, il baisse la tête vers Malou qui lobserve avec admiration ; il lui lance un sourire fraternel alors quelle remue la queue.
Puis ils tournent en même temps leur tête vers le public en délire
Mais peu à peu, le public disparaît jusquà ce que la première silhouette ne soit plus que la seule présence dans les gradins. La folie sonore sestompe également pour ne devenir qun simple écho, puis le silence.
Alors le clown salue lenfant, disparaissant à son tour.
10. CIRQUE / LOGE DU CLOWN INT NUIT
Le clown rejoint sa loge, suivit de près par Malou. Il se dirige vers le miroir dun pas lourd mais digne. Malou retrouve, sans traîner la patte, son petit panier en osier dans lequel elle sallonge délicatement après avoir effectué deux ou trois tours sur elle même. Elle pose son museau entre ses deux pattes avant, jette un dernier regard sur son « ami », puis ferme les yeux.
Le Clown (off)
Je ne sais pas quoi vous dire ! Jai limpression
d avoir pris une leçon dhumilité. Ce soir, on ma
donné une dernière chance. Ce soir, je me suis accordé
une dernière chance. Il me semble, maintenant, que
lenfant est à nouveau légal de ladulte, en moi.
Le clown reste un moment immobile devant son miroir, les mains sur les hanches.
Le Clown (off)
Je suis souverain parmi tant dautres au royaume
des enfants ; un royaume où le sens même de la vie
est régulé par le rire ou un sourire. Les enfants
sont nos archanges ; ils veillent sur nous sans le
savoir. Ils savent nous rappeler de ne pas devenir
« adulte » trop rapidement.
Il ôte sa veste. Ses mouvements maladroits traduisent un épuisement certain. Toujours face au miroir, il tient sa veste par le col, et plonge sa main libre dans une poche. Il tire, alors, une photo quil regarde brièvement. Il la pose ensuite sur la table de maquillage et séloigne, disparaissant progressivement dans lobscurité de sa loge.
La photo, marquée par les années, est posée sur la table au milieu de différents accessoires de maquillage. Elle immortalise, en noir et blanc, un enfant souriant, bien coiffé, le regard plein de fierté, posant, semble-il, pour un portrait scolaire.
Le Clown (off)
Je nai plus quun souvenir de ma mère; la photo dont
elle ne se séparait jamais. Celle de son ange gardien
comme elle disait. Désormais, il nous protègera tous
les deux !
Lenfant sur la photo ressemble à sy méprendre à la silhouette dans les gradins.
Le Clown (off)
Cest lui, dailleurs, qui ce soir, ma chuchoté à
loreille : ce que les médecins font pour le corps,
les clowns le font pour lâme !
FIN.
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Cédric Aguilar
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